Archives du Forum "Noir, l'arc-en-ciel"

Cette page reprend l'essentiel des interventions postées en 2007 sur un forum consacré à
la pièce Noir, l'arc-en-ciel sur le site de la Bibliothèque on-line Alexandrie.
Les Forums ayant été retirés de ce site en 2013, quelques extraits disponibles ont été repris sur le site de Raymond Derynck.
Les autres extraits ont été perdus ou effacés.

Le pseudo utilisé sur le site est un anagramme approximatif : Myrcan de Jokrind.

 




Posté le 2007-01-22
à 22:06:00








le 24-01-2007 à 12:23


Noir, l'arc-en-ciel ou l'église cathare au bûcher....
Résumé de l'ouvrage
Cette pièce suit quelques personnages pendant la Croisade contre les ALBIGEOIS au début du 13 ème siècle. Pour l'essentiel, les personnages sont du Sud et perçoivent donc la croisade comme une agression formidable. La première partie se situe à Narbonne et se déroule dans un laps de temps très court (quelques semaines) au tout début de la croisade.
La seconde partie au contraire couvre une période de temps de trois ou quatre décennies pour se terminer à MONTSEGUR.


Commentaire de Ishtar, initiatrice du forum et auteur(e) de nombreux romans.


Carine Geerts dont le pseudo est Ishtar a écrit et diffusé en Belgique un dixaine de romans. Le premier s'intitulant Ishtar.



J'ai toujours eu un faible pour l'histoire du catharisme et j'aime énormément la région occitane.
Personnellement, j'estime que l'écriture de "Noir, l'arc en ciel" est bien ficelée.
Vous connaissez très bien l'historique qui opposait l'église du Christ à l'église persécutrice et il serait intéressant de voir votre texte avec des acteurs et des décors.
D'un point de vue historique, l'on peut dire maintenant que le comte de Toulouse avec son bastion insoumis de Montségur et sa chevalerie faydite, avait vraiment joué sa dernière carte contre le roi et l'église de Rome; c'est vraisemblablement le bûcher qui a consumé ses derniers espoirs tout en emportant ce qui restait des cathares occitans.
Comme eux, je crois au salut Universel et je ne vois aucun symbole de rédemption dans la Croix... elle est à mes yeux, un instrument de mort et non de vie. Bref, je vais probablement arrêter là, ma lancée sur les grands débâts théologiques des premiers siècles chrétiens mais si vous le désirez, il serait éventuellement judicieux d'ouvrir un fil à ce sujet, dans le forum Bibliothèque.


Merci Monsieur Derynck de me donner l'autorisation de commenter votre ouvrage "Noir, l'arc-en-ciel"...
Comme je me suis permise de vous l'expliquer dans un précédent message; je me suis embrasée pour le catharisme suite à la lecture du livre de Napoléon Peyrat "histoire des Albigeois".
Etant libre de tout préjugé confessionnel, cela m'a permit de pouvoir m'intéresser au catharisme principalement d'un point de vue historique afin de comprendre le cheminement de la vision militante de l'église romaine qui en est arrivée à accuser et à condamner au silence des bons chrétiens.
Vous avez écrit, la 1ère partie de votre ouvrage "Noir, l'arc-en-ciel" sur l'épisode de la croisade contre les Albigeois; je suppose que c'est vraisemblablement à partir de là, que l'église romaine, suite à la réforme grégorienne, s'est déclarée conçue comme une monarchie et qu'elle s'est mise à prêcher la "guerre sainte" contre les forces du mal, en éliminant les infidèles et les hérétiques...

Qu'en pensez-vous Monsieur Derynck ?

Ishtar



Posté le 2007-01-23
à 13:48


Réponse de Myrcan de Jokrind


Merci d'ouvrir un forum à propos de ce texte sur l'épopée Cathare.

A l'époque de sa rédaction, le but était de se livrer à un exercice d'écriture pour le théâtre sur un sujet historique un peu en marge des grandes étapes de référence de notre histoire de France ...
Produire un texte susceptible de servir à un travail collectif de réalisation dans le cadre de stages de théâtre.
Rapidement, je me suis passionné pour ce sujet qui m'est apparu fondamental et qui m'imposait de relever un double défi :

• Comment rendre sensible sur le théâtre une page d’histoire qui a duré un demi siècle,
• Comment rendre perceptible sur le théâtre une pensée aussi sensible et subtile que celle dans laquelle ont baigné les contés de Toulouse et Trencavel dans ce début du treizième siècle.


Le caractère fondamental à mon sens vient du destin systématiquement tragique de toutes les civilisations qui se sont fondées sur cette idéologie dite dualiste où il est proclamé que l’univers est la manifestation du conflit entre les deux « forces » baptisées le « bien » et le « mal ».
L’idéologie choisissant naturellement de prendre jusqu’au bout le partie du « bien » induit une inclination à la connaissance et à la tolérance.
Mais elle induit aussi , comme par l’effet d’un miroir en négatif, l’obscurantisme et la bêtise dans le camp qui se présente comme l’adversaire.

Et c’est historiquement toujours ce dernier qui l’emporte au bout du compte.

C’est un peu cette réflexion qui a présidé à la composition du Titre. L’arc en ciel dans sa splendeur universelle (qui analyse et décompose la lumière blanche) recouvre en fin de compte la noirceur et la souffrance.

Le caractère poétique de la langue fut une des réponses au second défi :
Recourir aux chœurs qui mettent en mouvement la sensibilité collective (le peuple, la foule) et exprimer par des images et des métaphores cette sensibilité collective.
A noter que le texte final (le chœur des brûlés) a été le premier texte composé, il est une sorte de résumé où tout est dit.

Un autre choix a été de ne mettre en jeu aucun des personnages historiques. Certes, on en parle, on les cite, (on les voit passer) mais aucune des grandes figures ne constitue un protagoniste de la pièce.

Un personnage un peu particulier (Flaoune) sert de contrepoint et de fil rouge mythique. Il peut être vu comme celui qui sait de façon cynique mais ne peut choisir et se contente de dire ou de moquer.

La composition psychologique des personnages est relativement sommaire car ce qui importe c’est de montrer comment ils sont ballotés dans ces événements et non comment ils se valorisent en les combattant.
Pierre est le personnage dont la pièce est sensée suivre l’itinéraire. Initialement, cet artisan de bonne volonté est plutôt du bord de l’« église Romaine », les événements le conduisent à prendre partie pour les « cathares » et en toute fin à refuser de s’emprisonner dans ce mouvement de « suicide collectif » que constitue le bûcher de Montségur.
D’une certaine façon il rejoint le caractère mythique du personnage de Flaoune.

Enfin pour terminer ces commentaires sur la pièce, il faut souligner les unités de temps complètement écartelées entre la première et la seconde partie.
La première partie qui sert d’exposition, présente les personnages et le contexte historique autour d’événements qui se déroulent dans un laps de temps de quelques semaines au tout début de la croisade contre les Albigeois.
La seconde partie suit en pointillés chacun des personnages au travers de la période de quatre décennies qui suit. Les scènes montrent des événements qui supportent la réflexion sur la relativité des fois et la symétrie des violences.
Quelque nouveaux personnages guerriers sont même introduits pour montrer le caractère moderne des mercenaires et des managers de la guerre. Ces derniers n’ont rien à cirer des idéologies et des croyances, leurs seuls objectifs sont stratégiques voire politiques. Pourtant ils participent pleinement à l’horreur et à la souffrance.


Pour répondre à la question d’Ishtar:
On peut voir dans la dérive du Pouvoir de l’église Romaine une des raisons du Catharisme. Mais à mon avis, celui-ci s’enracine depuis Manès (voire Zoroastre) dans des traditions qui dépassent le simple catholicisme.
L’église Romaine et ses dérives de pouvoir et de corruption a été un des repoussoirs contre lequel s’est adossé naturellement la foi cathare. Mais celle-ci serait nécessairement apparu là ou ailleurs. Elle était d’ailleurs présente en Italie, dans le Nord de l’Europe etc.
C’est d’une certaine façon l’épanouissement de la « civilisation » de Toulouse qui a pu accompagner l’épanouissement de cette idéologie.
Une des réponses de l’église Romaine a d’ailleurs été de promouvoir la « simplicité » des Bonshommes Cathares en les imitant dans la personne de Saint Dominique.
Et comme balancier de l’horreur, c’est les Dominicains qui sont les inventeurs et animateurs de l’« Inquisition ».


Je souhaite « bon vent » à ce forum et félicite sa courageuse initiatrice.

Myrcan de Jokrind




Posté le 2007-01-23
à 22:17


Commentaire de Ishtar


Il est certain Monsieur Derynck que les théologiens catholiques ont voulu assimiler les racines du dualisme cathare dans une filiation orientale reliant Manès à Zoroastre, et les cathares à Manès en passant par les pauliciens et les bogomiles. Cela mettait tout le monde d'accord ! (sourire)
Depuis peu, des documents inquisitoriaux permettent d'entrouvrir d'autres perspectives sur les cathares; d'après ces documents, l'hérésie y perdrait son caractère oriental et ses croyants seraient plutôt des chrétiens arianistes.

Ce qui est certain à l'heure actuelle, c'est que l'église cathare a été éliminée pour s'être placée en travers de la route de la papauté, au temps où celle-ci voulait édifier son pouvoir théocratique.

Ishtar




Posté le 2007-01-25
à 09:47


Commentaire de Ishtar





Raymond Derynck à écrit :
..."Le caractère fondamental à mon sens vient du destin systématiquement tragique de toutes les civilisations qui se sont fondées sur cette idéologie dite dualiste où il est proclamé que l’univers est la manifestation du conflit entre les deux « forces » baptisées le « bien » et le « mal ». L’idéologie choisissant naturellement de prendre le partie du « bien » jusqu’au bout induit une inclination à la connaissance et à la tolérance. Mais elle induit aussi comme par l’effet d’un miroir en négatif l’obscurantisme et la bêtise dans le camp qui se présente comme l’adversaire. Et c’est historiquement toujours ce dernier qui l’emporte au bout du compte"...


C'est parfaitement vrai Monsieur Derynck et ce qui est aberrant, c'est que la révélation chrétienne annonce également que Dieu est bon et aime ses créatures. C'est elle qui rend particulièrement douloureux le problème du mal en ce monde.
Les Evangélistes du 11ème siècle ont oubliés, que le christianisme portait aussi en lui un germe de dualisme (cfr. l'Evangile parle qu'un bon arbre ne peut porter de mauvais fruits, etc,...)...
Je pense que si il n'y avait pas eu de parti pris concernant l'interprétation de certaines écritures; il n'y aurait peut-être pas eu autant de morts bien que ... pour l'Eglise romaine, c'était un mal nécessaire pour assurer son pouvoir et sa marque comme religion d'état.

Ishtar




Posté le 2007-01-25
à 19:53


Réponse de Myrcan de jokrind




Ishtar,
Vous pointez le complot de l'église romaine en vue d'assurer son pouvoir.
La croisade du début du treizième siècle n'est pas une guerre de conquête au profit de Rome. Rome s'est toujours appuyé sur les autorités politiques distinctes d'elle-même pour opérer ses mouvements.
Et le résultat de cette croisade est qu'une région en plein essor économique et culturel (je parle du Sud de la France) s'est trouvé sous le joug de la soldatesque du Nord qui pouvait faire figure de barbare et d'inculte. La Papauté s'est contenté de pousser des pions qui ne demandaient qu'à se mettre en mouvement.
Si la menace idéologique que représentaient les Bonshommes n'était pas apparue, peut-être la capitale serait-elle aujourd'hui Toulouse et la puissance culturelle ferait que nous parlerions occitan jusqu'au nord de Paris.

Ces suppositions sont d'ailleurs sans intérêts.
Le pouvoir que Rome semble avoir voulu concerver, c'est celui des croyances et des dogmes. Les politiques ont pris ce combat à leur compte pour servir leurs intérêts.
Et le vrai vainqueur au bout du compte est le Roi de France.

"Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens !"

Celui qui donne l'ordre est un représentant de Rome. Mais ceux qui s'adonnent à la basse besogne sont les soldats du Nord et les gueux de l'époque.

L'épopée Cathare est un premice à la mode du moyen âge des futures guerres de religions où une remise en cause des dogmes induit avec la bénédiction des autorités religieuses le déchaînement des rancoeurs et violences privées.

Une des caractéristiques de cette "civilisation" du Sud est la tolérance à toutes les idéologies et l'ouverture "réciproques" des groupes les uns aux autres. C'est certainement cette vivacité de la connaissance et des moeurs qui a pu servir de prétexte aux envahisseurs.
Il n'est pas nécessaire d'aller bien loin pour trouver des analogies avec des événements plus récents (Thécoslovaquie, Hongrie, Chili, Liban)

Ce sont ces idées qui ont servi de guide à la construction de la pièce.

Pourquoi la théorie dualiste s'est-elle trouvé à la fois le ferment de cet épanouissement culturel, la cible et la victime des violences barbares et d'une certaine façon la naratrice prophétique de cette "vérité" ? C'est une question à laquelle on peut essayer de répondre.

Myrcan de Jokrind




Posté le 2007-01-26
à 14:29


Commentaire de Ishtar




Il est certain Monsieur Derynck, que les gens du midi prétendaient réformer la morale chrétienne et les moeurs du clergé.
Les cathares professaient que la perfection était dans l'âme et qu'à la mort, l'absolution donnée par un Bonhomme assurait le salut éternel.
Il a été dit que le Pape n'avait pas réussit à convertir les Bonhommes et que celui-ci demanda à Philippe Auguste d'aller les combattre les armes à la main.

La 1ère croisade royale mené par Philippe Auguste est marquée de façon sinistre par le massacre des Albigeois (féodaux occitans) coupables de protéger l'hérésie; car ceux-ci se moquaient ouvertement des envoyés du Pape et protégeaient au sein de leur bourgade, les communautés cathares.

Les féodaux occitans étaient anti-cléricaux et leur tolérance hérétique était considérée comme une offense contre Dieu. Finalement, et vous aviez raison Monsieur Derynck; la croisade contre les protecteurs d'hérétiques sera devenue une guerre de conquête royale.

Raymond Derynck à écrit :

..."Pourquoi la théorie dualiste s'est-elle trouvé à la fois le ferment de cet épanouissement culturel, la cible et la victime des violences barbares et d'une certaine façon la naratrice prophétique de cette "vérité" ?"...

D'après Henri-Charles Puech, le dualisme serait une solution que découvre les hommes plongés dans l'angoisse lors d'un changement profond, lors d'une période de transition ou lors des mouvements de balancier de l'histoire.
Les premières violences barbares contre les hérétiques auraient débutés au 10ème siècle, au moment où l'Eglise se coule dans le vide politique laissé par l'Empire de Charlemagne.
De plus, la fin du monde est prévue au moment du passage de l'an mil -> les ferveurs chrétiennes populaires redoublèrent à ce moment là, appelant à un renouveau d'espérance évangélique.

Qu'en pensez-vous Monsieur Derynck ?

Ishtar




Posté le 2007-01-30
à 21:47


Commentaire de Ishtar


Pour revenir au dualisme; il me semblait que c'était une notion proprement gnostique.... démontrant que l'homme participe à la fois au monde inférieur (les ténèbres) et à la nature supérieure (la lumière).
A la lumière s'oppose les ténèbres; c'est cela l'intuition gnostique de l'opposition radicale de deux mondes.
Mani était un dualiste radicale et comme les cathares; il était persuadé que la lumière et les ténèbres, étaient deux mondes foncièrement incompatibles... Est-ce cela qui a fait d'eux des victimes d'une répression féroce ?

Ishtar




Posté le 2007-01-31
à 11:13


Réponse de Myrcan de Jokrind


Chère Ishtar,

Je ne suis pas Historien ! Et mes réponses ou interventions ne sauraient constituer nullement une référence à propos des événements et des œuvres historiques relatives à cette période.
La seule préoccupation que j’ai pu avoir à l’époque de la rédaction et après avoir lu quelques uns des principaux ouvrages disponibles alors sur le sujet a été de produire un texte dramatique.

Ce qui est porté sur le théâtre destiné à la sensibilité du spectateur, c’est ce qui est universel.
Qu’importe en définitive quel Roi, quel Pape, quelle stratégie, quel fait d’arme.

Des cités, ensemble, ont vu se développer en leur sein un sens aigüe de la justice, de la tolérance. Une collectivité humaine a connu un mouvement vers le savoir et le respect réciproque. L’élite aristocratique éclairée a toléré et joui à la fois de la maturation de la classe bourgeoise. Les sociétés ont connu un essor économique nourri de l’aspiration aux savoirs et de l’interrogation eschatologique ouverte.
Des aspirations mystiques, après les terreurs millénaristes se sont nourries de la diffusion des théories dualistes confirmées par la corruption du clergé catholique.

Cette période d’essor du Catharisme n’est pas une période d’angoisse mais d’espoir. C’est peut-être en cela qu’elle fascine encore aujourd’hui comme elle dû furieusement agacer les autorités de l’église Romaine et susciter les convoitises des princes du Nord.

L’essor et l’espoir sont à la mesure de la douleur et de la dépression que l’agression des croisés a dû provoquer. Destruction répond à croissance, Suspicion répond à tolérance, Dogmatisme répond à science.

Je pense à l’entrée des chars soviétiques à Prague. Je pense au coup d’état militaire au Chili voire aux bombardements israéliens sur le Liban en phase de reconstruction.
Et voici l’intrusion brutale des forces du mal dans un tissu en cours de croissance harmonieuse et vivante. Et l’histoire se construit par des événements douloureux et déchirants. Des taches sanguinolentes ponctuent le grand calendrier de l’histoire.

Comment ne pas être interpelé par la vérité « poétique » de la métaphore dualiste. Le « bien » et le « mal » se livrent un combat dont la manifestation, le produit, c’est le monde !

Est-ce que le texte permet d’accéder à cette perception ? Est ce que le spectacle donne à ressentir ce déchirement ? Si c’est le cas, alors l’objectif est atteint et d’une certaine façon le spectateur est en communication avec les hommes du Sud au treizième siècle. Et réciproquement les hommes du treizième siècle nous lancent un message à travers le spectacle.

Est-ce que ces quelques lignes répondent à votre attente ?
Il est une autre perspective de débat qui peut s’appuyer sur les deux scènes du début de la seconde partie. Je vous laisse la rechercher.

Amicalement.

Raymond Derynck.




Posté le 2007-02-02
à 14:56


Commentaire de Ishtar


Monsieur Derynck à écrit :
..."cette période d'essor du catharisme n'est pas une période d'angoisse mais d'espoir"...

D'espoir !
Je ne le pense pas Monsieur Derynck.
Comment se fait-il que les cathares, les gnostiques, les alchimistes, les ésotériques durent employer une langue volontairement confuse.
D'après moi, il s'agissait de protéger leur savoir mais aussi de se protéger eux-mêmes, les uns et les autres, d'une Eglise dictatoriale qui les envoyait immanquablement rôtir dans les flammes.

Quant aux populations paysannes; elles sont dans la dépendance et le sevrage et connaissent la famine...
Cette partie du Moyen-Age est à mes yeux terriblement obscure, violente et miséreuse....


Monsieur Derynck à écrit : ...
"une collectivité humaine a connu un mouvement vers le savoir"...

Au 11ème siècle, la culture ne concernait qu'une minorité des populations médiévales puisqu'elle supposait l'usage de l'écriture et du latin, enseignés dans les écoles monastiques. Les autres tranches de la population étaient pour la plupart des illétrés et la "culture" était essentiellement orale et visuelle.
Il me semble que ce n'est qu'au 14ème siècle que la première université a vu le jour avec le cursus comprenant les fameux "trivium" et "quadrivium".


Monsieur Derynck à écrit :
..."comment ne pas être interpellé par la vérité poétique de la métaphore dualiste.
Le bien et le mal se livrent un combat dont la manifestation, le produit, c'est le monde"...

Chaque personne doit obligatoirement passer par différents stades, par différentes épreuves. Il doit expérimenter tous les sentiments "bons" et "mauvais".
Il me semble que le comble de la sagesse, n'est pas la grenouille de bénitier mais la personne qui est passée par tous les stades et qui a fait le "mal" mais qui s'en est détournée.


Monsieur Derynck à écrit :
..."Est-ce que le texte permet d’accéder à cette perception ? Est ce que le spectacle donne à ressentir ce déchirement ? Si c’est le cas, alors l’objectif est atteint"...

Après réflexion, je suis en mesure de vous répondre OUI.
Comme je vous le disais dans le premier message de ce fil, j'estime que l'écriture de "Noir, l'arc en ciel" est bien ficelée et vous connaissez très bien l'historique qui opposait l'église du Christ à l'église persécutrice.
Il serait intéressant de voir votre texte avec des acteurs et des décors lors d'une présentation théâtrale.

C'est ce que je vous souhaite Monsieur Derynck....


Monsieur Derynck à écrit :
..."Est-ce que ces quelques lignes répondent à votre attente ?"...

Oui et encore un tout grand merci d'avoir pris la peine de répondre à mes questions concernant le cheminement de la vision militante de l'église romaine pour en arriver à accuser et à condamner au silence des bons chrétiens.

Ishtar




Posté le 2007-02-02
à 16:07


Commentaire de Ishtar


Monsieur Derynck à écrit :
..."Il est une autre perspective de débat qui peut s’appuyer sur les deux scènes du début de la seconde partie.
Je vous laisse la rechercher"...

Dans votre ouvrage, je lis que le comte de Toulouse aurait fui en Angleterre avec son fils !
Il me semblait que le comte de Toulouse s'était lui-même lié les mains en s'engageant à désarmer ses places fortes, en donnant sa fille à un capétien et en signant le traîté de Meaux...
je suppose que c'est cela qui a fait la perte de l'Occitanie car les capétiens avaient un pied en Languedoc et l'Eglise avait également les coudées franches pour agir aux Pays d'Oc...
Le pouvoir a changé de mains; les chevaliers faydits sont soumis et dépossédés de leurs biens, les communautés cathares sont livrées à elles-mêmes.
Croyez-vous vraiment que si le comte de Toulouse n'avait pas signé le traîté de Meaux, l'Eglise occitane serait toujours existante ?

Ishtar




Posté le 2007-02-20
à 18:06


Commentaire de Janik


Janik Pilet est professeur, universitaire et à l'origine d'une école d'ingénieur. Passionné et féru d'ésotérisme, il a déposé plusieurs ouvrages sur le site d'Alexandrie on-line. Le sceau de Salomon, Dieu ou La pierre phylosophale du physicien et Les sorcières du vent.


Chère Ishtar,

Ne pensez pas que je boude vos appels, mais il me fallait d'abord lire la pièce de Raymond Derynck, fort bien écrite, et que j'aurais eu bien du plaisir à voir mettre en scène.
En fait je suis assez ignare sur le sujet. J'avais entendu parler de leur filiation manichéenne, mais comme le dualisme est assez éloigné de mon système de pensée, je n'ai guère cherché à l'époque à approfondir le sujet. D'autant que j'en avais retenu, peut-être à tort, des aspects ascétiques, dogmatiques et fanatiques qui ne me les rendaient pas vraiment beaucoup plus sympathiques que leurs persécuteurs.
Il est certain qu'ils ont été en contact avec les templiers, mais je ne pense pas qu'il y ait eu transmission de doctrine entre eux. L'absence de conflit me semble plutôt attribuable à un certain esprit de tolérance qui n'était certes pas celui de Rome.

Quant à dire, comme le fait Athanor, que le dualisme soit ultra présent chez les FM, permettez-moi d'émettre quelques réserves...


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"Il y a plus de choses dans le ciel et sur la terre, Horacio, qu'on ne l'imagine dans les rêves de votre philosophie", Hamlet, Acte 1, Sc. XII

Janik




Posté le 2007-02-21
à 09:23


Réponse de Ishtar à Janik.


Janik;
veuillez m'excuser d'avoir insisté à ce point... désireuse de connaître vos lumières à propos de certains sujets. Je suis heureuse de vous lire. Merci d'être là !

Vous dîtes Janik :
..."le dualisme est assez éloigné de mon système de pensée, je n'ai guère cherché à l'époque à approfondir le sujet. D'autant que j'en avais retenu, peut-être à tort, des aspects ascétiques, dogmatiques et fanatiques qui ne me les rendaient pas vraiment beaucoup plus sympathiques que leurs persécuteurs"...

Je peux comprendre votre point de vue Janik mais sachez cependant que le seul aspect redoutable était la menace que cette "secte" (je n'aime pas beaucoup le mot) faisait peser sur l'unité de l'Eglise de Rome.

Longtemps, le manichéïsme a été considéré comme un mouvement de rêveries bizarres, d'incohérences, de mythes étranges, de fantasmagories dénués de tout intérêt philosophiques, de délires, d'absurdité, de malice, de cruauté, de perversité, d'omniprésence gluante du mal, etc,... mais malgré tout cela, je ne pense pas Janik que c'est une raison pour martyriser et tuer des personnes par le fer et la lance...

Vous dîtes Janik :
..."Quant à dire, comme le fait Anathor, que le dualisme soit ultra présent chez les FM, permettez-moi d'émettre quelques réserves"...


Admettons Janik, qu'il y est présent dans certaines loges. Il me semble que les frères de la SRIA poursuivent un travail initiatique basé sur le manichéïsme en plus de la connaissance salvatrice.
Sur le net, j'ai trouvé trace de l'ordre des "Builders of the Adytum" fondé par Paul Foster Case; eux-aussi étudient la cosmogonie...

Comme vous Janik et je pense que Monsieur Derynck, nous rejoint dans cette idée également; que les Templiers ne se soient pas converti à la foi cathare. Je pense aussi qu'il devait y avoir entre-eux (les Cathares et les Templiers) un esprit de tolérance et de sympathie que l'Eglise de Rome était loin d'avoir.

Je vais me permettre de soulever un point qui me tracasse encore et toujours; peut-être Athanor pourra-t'il y répondre. Il a été dit que le dessein de l'Ordre du Temple était de vouloir unifier la Croix et le Croissant.
Ils voulaient (les Templiers) écraser l'Eglise de Rome et le Lys (la Maison de France) pour fonder une société universelle dirigée par une élite de philosophes pour faire le bonheur de l'humanité.
Qu'en est-il au juste ?


Ishtar




Posté le 2007-02-21
à 10:10


Réponse de Myrcan de Jokrind à la cantonade



Bonsoir Ishtar, bonsoir Athanor.

Les quelques échanges récents relatifs aux Templiers dans le cadre de ce forum autour des Cathares me conduisent à un ensemble de commentaires que je concrétiserai par trois interventions distinctes afin de ne pas créer des tunnels illisibles.

J’intitule les trois interventions :
- In Memoriam,
- Le théâtre de l’histoire,
- Le Graal et « Les Temps Périlleux »


Bonne lecture,
Amicalement.


Myrcan de Jokrind




Posté le 2007-02-21
à 10:15


Intervention de Myrcan de Jokrind


- In Memoriam -

« Les Templiers », ordre de chevalerie, a été créé au douzième siècle en Palestine afin d’offrir aux croisés et aux pèlerins chrétiens d’occident une protection contre les harcèlements dont ils étaient victimes de la part des maures et des milices autochtones (on comprend un peu et les uns et les autres).
Supporté et conforté par la papauté l’ordre s’est développé et a acquis une stature logistique dans toute la chrétienté.

Cette confrérie constituait une organisation « temporelle » et son objectif n’avait de lien avec la spiritualité, que la motivation des pèlerins qu’elle protégeait et dont elle organisait et encadrait la marche.

En poussant volontairement un peu, j’imagine un certain nombre de parallèles avec l’organisation des pèlerinages de La Mecque, aujourd’hui, ou de l’office du tourisme de Lourdes… En poussant, car cette tâche était périlleuse. La vindicte des infidèle ou des chrétiens d’orient pouvait conduire à des combats, pièges, rackets et autres prises d’otages ; tout ce qui est imaginable en terme de violence et d’horreur.

Le service rendu aux pèlerins trouvait sa rétribution dans le financement de l’ordre par les pèlerins eux-mêmes ou par la Papauté. Est-ce là l’origine du trésor des templiers ?

La désignation « Templiers » vient du lieu de Jérusalem où pour la première fois ont été rassemblés, accueillis et hébergés les chevaliers de l’ordre ; le mur du temple de Salomon qu’on appelle aujourd’hui « mur des lamentations ».

Si nous sommes tentés d’établir des liens entre les Templiers et les Cathares depuis notre observatoire contemporain, c’est que dans les deux cas des armes ont été portées dans un contexte religieux. Mais les combattants n’avaient ni les mêmes objectifs, ni les mêmes cibles.

Pour en revenir aux Cathares, j’insiste sur le fait que le tissu social, même en dehors des Parfaits, des Parfaites et des faydits, était baigné dans la préoccupation de la foi. Pour ou contre les propositions Cathares, on débattait, on écoutait, on échangeait des arguments dans les chaumières dans les campagnes, dans les marchés. Que je sache il n’y a pas eu des conférences contradictoires publiques relatives aux statuts de l’ordre des Templiers.

L’Epopée Cathare a été initié par le sac de Béziers. Cet IMMENSE MASSACRE a fondé dans le sang un épisode tragique qui a vu s’affronter et mourir des dizaines de milliers d’hommes et de femmes.
Les massacres de milliers au nom du Christ,
Les brûlés par centaines qui refusent d’abjurer leur foi.
Les ratissages systématiques par l’Inquisition pour piéger et expurger les idées qualifiées d’hérétiques.

En mémoire de la souffrance épandue sur les Terres du SUD pendant des décennies, je me refuse à confondre ces deux phénomènes de l’histoire. Je pense qu’ils ne peuvent pas être mis sur le même plan. Certes les Cathares ne viendront pas manifester leur reconnaissance d’affirmer cette conviction dans notre petit forum et je n’ai pas de pouvoir ou de position particulière à défendre, mais je tiens à ce que cette opinion soit exprimée.


Amicalement.


Myrcan de Jokrind




Posté le 2007-02-21
à 17:54


Réponse de Ishtar


Je sais parfaitement bien Monsieur Derynck, qu'il est temps de rendre à eux-même les Bons Hommes mais malheureusement l'on ne peut empêcher les récupérations sordides ni le petit commerce de la catharophilie de continuer à peupler boutiques et librairies; pour cela, il suffit d'aller se promener dans la cité médiévale de Carcassonne pour s'en rendre compte.

En ce qui me concerne, je ne peux m'empêcher de croire que lors de la seconde croisade, les seigneurs faydits rencontrèrent en Orient des manichéens et qu'ensuite ils propagèrent cette "doctrine" une fois rentrés chez eux et que celle-ci devint le catharisme.
Je ne peux m'empêcher de m'imaginer que lors de la seconde croisade, les seigneurs faydits furent en contact avec les chevaliers du Temple et que la croyance dualiste des Templiers viendrait de là.

Ishtar




Posté le 2007-02-22
à 10:12


Intervention de Myrcan de Jokrind


Bonjour à tous,

- Le Théâtre de l’Histoire -

Tout au long de ce Forum je m’appliquerai de ramener l’attention vers son objet : « Noir, l’arc-en-ciel » Pièce de théâtre à propos de la Croisade contre les Albigeois. Je suis reconnaissant à Janik d’avoir eu le courage d’absorber cette lecture.
Une difficulté avec les sujets historiques consiste à ne pas exiger du lecteur/spectateur des connaissances spécifiques. Il convient donc d’avoir une démarche de pédagogue mais pas d’enseignant (d’apprenneur). Apprendre vraiment, c’est transmettre l’amour des choses et non pas les choses elles-mêmes.

Un des exercices magistraux auquel j’ai eu le bonheur d’assister a été le spectacle du Théâtre du Soleil : «1789 ». A la fin de ce spectacle, chaque spectateur avait nécessairement appris un pan de notre histoire commune, même si au début certains pouvaient être persuadés de connaître par cœur ce chapitre de la Révolution. Des raccourcis, des métaphores, des « manipulations de l’émotion » dans les textes et dans la mise en scène rendaient évidents les rapports du pouvoir, de l’ambition et de la souffrance des populations. Et le spectateur était emporté dans un tourbillon d’émotion individuelle ou collective mais aussi respecté et tenu par la main vers la compréhension d’une vision claire de l’histoire.

Essayons donc de rendre clair toute allusion à un évènement, un personnage, un dogme, en le resituant. Les lecteurs de ce forum (moi, compris) ne doivent pas être impressionnés par l’érudition des intervenants mais être conviés à un débat où ils se sentent admis.
A leur intention, je dirai que les « Faydits » sont ces seigneurs du Sud qui sans être particulièrement convertis à la foi Cathare ont combattu les croisés notamment parce que leurs terres leur avait été confisquées. Plus généralement ce sont des combattants du SUD qui bien que catholiques ont résisté à l’invasion des croisés du NORD.
Chère Ishtar, pouvez-vous développer ce qu’ont de fameux, le château de Montsalvage, le VITRIOL et l’Ouroboros Gnostique dont j’ignorai le nom, et dont j’ai oublié ce qu’en dit la littérature à propos des Cathares. Caprice de mon insondable inculture, pourriez-vous m’éclairer (ainsi que le lecteur fortuit de ce fil) sur la signification des lettres F.M. qui semblent accompagner les gnostiques, les alchimistes et autres ésotérismes. (J’hésite entre Fusil Mitrailleur et Frère Mariste)

Une autre contrainte dans les évocations historiques est l’absolue nécessité de synthèse. Tout ne pouvant être dit, il faut croquer l’essentiel. Espérer que le résultat ne contredira pas la vérité et que l’émotion provoquée chez l’auditeur conserve un lien celle des vrais protagonistes.
Ainsi, imaginer des personnages originaux peu procéder de ce flou et néanmoins servir la vérité.

Je suis convaincu que la transmission, le passage, de cette émotion est une clé des œuvres. L’écriture procède donc à la simplification en remplaçant des faisceaux complexes de faits par des traits romanesque ou poétiques ou les deux.

Pour illustrer ce point, j’évoquerai dans « Noir, l’arc-en-ciel » l’annonce de la prise de Béziers par les croisés. Nulle part le mot de « Sac de Béziers » n’est prononcé. Cependant des phrases proférées par le chœur (comme rumeurs dans la foule) évoquent des évènements ou des personne qui ont peut-être existé, peut-être pas. Mais la tonalité autour de « Béziers brûle » marque l’affolement populaire devant la catastrophe annoncée.

Parmi les sujets volontairement écartés de l’ouvrage, figure l’ésotérisme avec son lot de signes de théories, et d’analogies approximatives. Ce choix a été pris devant l’évidence que ces couches abstraites étaient globalement éloignées des préoccupations quotidiennes des populations au cours des quarante années parcourues. Les formules alchimiques n’ont motivé ni les massacres, ni les tortures ni les bûchers. C’est toutefois un sujet fascinant en lui-même mais il ne figure pas dans le faisceau d’éclairage de la pièce, même si la poésie du langage peut parfois le laisser supposer.
La seule formule utilisée dans le texte est la prière des Cathares ; « le Notre Père » qui n’a d’exotique que le fait de figurer en langue d’Oc (avec l'accent).


Amicalement.

Myrcan de Jokrind




Posté le 2007-02-22
à 18:49


Réponse de Ishtar



Myrcan_de_Jokrind a écrit :
Chère Ishtar, pouvez-vous développer ce qu’ont de fameux, le château de Montsalvage, le VITRIOL et l’Ouroboros Gnostique dont j’ignorai le nom, et dont j’ai oublié ce qu’en dit la littérature à propos des Cathares. Caprice de mon insondable inculture, pourriez-vous m’éclairer (ainsi que le lecteur fortuit de ce fil) sur la signification des lettres F.M. qui semblent accompagner les gnostiques, les alchimistes et autres ésotérismes. (J’hésite entre Fusil Mitrailleur et Frère Mariste)

Il faut savoir Monsieur Derynck que chaque religion véhicule deux formes de savoir.
L'un relativement accessible, anecdotique et à la portée du plus grand nombre.
L'autre savoir se révèle plus profond et ésotérique... il n'est pas en contradiction avec le premier savoir; bien au contraire, il le complète...

Dans le cas du château de Montsalvage; la première forme du savoir, dirait que celui-ci est la demeure de vaillants chevaliers qui gardent le Graal (cfr. l'histoire de Perceval de Christian de Troyes).
La seconde forme de savoir est plus subtile (sourire) Le château de Montsalvage correspondrait au corps, avec tout le long de la colonne vertébrale un réseau de centres énergétiques nommés "chakras". En tout, il y a 7 chakras ! Dans Perceval de Christian de Troyes, le héros doit combattre à 7 reprises 7 chevaliers.
Toujours dans Perceval, le Roi Pêcheur explique au héros que les 7 combats symbolisent le combat intérieur contre les 7 péchés capitaux...
Dans la gnose, le chiffre 7 représente le principe créateur, c'est le chiffre de l'Univers... c'est la réussite lorsque les forces physiques et spirituelles sont équilibrées... Pour faire court, le chiffre 7 est le découverte de Soi, passant par le combat de Soi !

En ce qui concerne le fameux VITRIOL des Alchimistes; cela correspond à "visita interiora terrae et invenies occultum lapidem" en quelque sorte "explore l'intérieur de la terre et tu trouveras la pierre cachée".
Cela pourrait correspondre à la grande maxime socratique : "connais-toi toi-même"... et pour cela, il faut commencer par l'oeuvre au noir; c'est-à-dire descendre aux enfers pour affronter toutes ses pulsions négatives et les faires sortir à la lumière; c'est surtout apprendre à se connaître "soi-même". Pour faire court, la véritable connaissance de soi est la transformation de son être pour arriver à l'affinage et atteindre l'oeuvre au blanc et ensuite à l'oeuvre au rouge.

Et enfin, le fameux Ouroboros gnostique (sourire) C'est un serpent emblématique qui est représenté se mordant la queue, pour signifier qu'il se dévore lui-même et renaît de lui-même sans cesse. Il s'engendre lui-même et se sacrifie lui-même.
En bref, tout ce que fait le Pouvoir de l'Univers, se fait dans un cercle comme l'Ouroboros... la Terre est ronde, le Soleil se lève et redescend dans un cercle. Les saisons, dans leur changement, forment un cercle et reviennent toujours où elles étaient. La vie d'un homme est un cercle d'enfance à enfance, etc,...
L'Ouroboros est aussi un principe créateur...
Tout ceci est bien entendu un rapide condensé car l'extrême diversité des spéculatives ésotérique, alchimique ou gnostique pourraient faire croire qu'il pourrait y avoir des divergences et des oppositions dans les différentes interprétations mais je peux vous assurer Monsieur Derynck, qu'il reste malgré tout comme un "air de famille"...

Pour les lettres FM; cela correspond tout simplement à la Franc-Maçonnerie (sourire)...

Ishtar




Posté le 2007-02-23
à 11:36


Intervention de Myrcan de Jokrind


Bonjour à tous,

- Le Graal et « Les Temps Périlleux » -

Il ne faut pas s’étonner de voir apparaître le Graal et sa quête dans nos échanges.
Le Graal est la métaphore de la quête individuelle et de l’objet inatteignable personnalisé par la recherche sans fin et donc vaine.
La révélation de cette vanité constitue l’aboutissement éblouissant de la quête et donc l’accès à l’illumination, à la sagesse.
La révélation est d’autant plus éblouissante que la quête a été plus longue et douloureuse. La révélation matérialise et rend palpable en quelque sorte la vacuité de l’objet recherché.
Toucher le vide, être en présence de l’absent, vertige devant l’insondable.
Toutes les réflexions sur le désir humain ont donc partie liée avec le Graal, d’où l’universalité de ses manifestations. Je ne suis pas loin de considérer qu’il s’agit d’une voie vers la connaissance du fonctionnement du cerveau.
C’est un des moteurs de la littérature.


On retrouvera la quête dans beaucoup d’œuvres. Parfois prend des allures de voyage car tant que le but n’est pas atteint il porte tous les attributs du Graal (Jason, Ulysse, Don Quichotte, Le désert des Tartares, Le rayon vert, Orphée, Dante, Moby Dick) J’imagine que vous pensez spontanément à des kyrielles d’exemples qui auraient dû figurer en bonne place dans cette petite énumération. La littérature n’est pas la seule à recéler des exemples ; l’Alchimie, les Religions, les Grandes Explorations, les Grandes recherches scientifiques ont vu tant de héros en quête de leur GRAAL.

J’imagine des liens à établir entre Bernard Palissy, (qui s’est battu au 16ème siècle pour trouver le secret des émaux que les artistes italiens gardaient jalousement) et les chercheurs qui depuis plus de cinquante ans sont attachés au projet baptisé récemment ITER (mettre au point la machine qui produira à profusion dans cinquante ans l’énergie du soleil).

La quête, le désir humain et l’énergie psychique que l’un et l’autre mobilisent se trouvent au centre de la plupart de nos mouvements. C’est un cliché.

Depuis que Chrétien de Troyes à rédigé les romans de la Table Ronde autour du Roi ARTHUR La quête est le sujet littéraire par excellence. C’est au douzième siècle que ce thème s’est cristallisé sur le GRAAL, le Roi pêcheur qui le détient et les Chevaliers qui au nom de la confrérie de la Table Ronde vont parcourir le monde dans l’espoir de rapporter l’objet.

Merlin n’était pas encore vraiment protagoniste de l’histoire, mais déjà Lancelot, Perceval, Galaad étaient les pionniers de cette première ébauche de littérature de gare.

Il y a de la « B.D. » dans ces personnages. Lancelot pourrait ressembler à Corto Maltese, Galaad à Tintin, Perceval à Gaston Lagaffe, Arthur au capitaine Haddock.
Lorsque j’ai été amené à écrire « Les Temps Périlleux » dont le sujet est explicitement la quête du GRAAL autour de MERLIN l’enchanteur, j’aurai aimé proposer la dérision et de la prise de distance. L’utilisation d’extraits littéraires (Apollinaire, Chrétien de Troyes, Barjavel) m’a retenu d’aller aussi loin. La poésie s’en est trouvée servie par certaines scènes come la rencontre Merlin/Viviane, comme la Rencontre Morgane/Arthur par exemple. En contre partie, les leçons du Diable ou de Dieu à Merlin vont dans le sens de la dérision espérée.

Je suis admiratif de la série télé « KAMELOT » sur M6 qui montre les personnages du cycle arthurien avec une sensibilité toute contemporaine, un soupçon de vulgarité et une grande lucidité dans l’humour. C’est brillant. Les « Monty Python » ne sont pas loin.

Pourquoi tous ces développements à propos du GRAAL dans ce forum sur les Cathares ?
D’abord par vanité personnelle puisque cet autre texte est placé sur les rayonnages d’Alexandrie On-line. Peut-être la discussion devrait-elle se poursiuivre sur le forum parallèle.

Mais il est une remarque importante à mon sens qui touche notre sujet principal.
Le GRAAL comme métaphore est repris avec ses personnages dans nombre d’ouvrages des plus illusoires aux plus légers. Les caricatures des personnages arthuriens sont comprises par tous et le plus souvent appréciées.

Le GRAAL est un artéfact littéraire en quelque sorte tombé dans le « domaine public » des mythes et des civilisations en construction.

Ce n’est pas le cas de l’Epopée Cathare.
Une aura de crainte, de respect, de suspicion, vibre autour des souffrances de cette période et de cette région. Peut-être représente-t-elle le « meurtre fondateur » sur lequel s’est bâtie l’identité nationale. Ceci n’est qu’une proposition car on trouve tant de meurtres fondateurs dans l’histoire que la nausée n’est pas loin.
Ici encore, j’essaye de situer la question : Le GRAAL, par rapport à notre sujet : L’Epopée Cathare.


Merci de votre lecture.

Amicalement,


Myrcan de Jokrind




Posté le 2007-02-24
à 09:52


Réponse de Ishtar



Myrcan_de_Jokrind a écrit : Pourquoi tous ces développements à propos du GRAAL dans ce forum sur les Cathares ?

Parce que Monsieur Derynck, pour les Cathares, le Graal était le consolamentum.
Etre "parfait" n'était qu'un état préparatoire, c'était par le consolamentum que l'on parvenait au Salut...

Myrcan_de_Jokrind a écrit :
le cas de l’Epopée Cathare. Une aura de crainte, de respect, de suspicion, vibre autour des souffrances de cette période et de cette région. Peut-être représente-t-elle le « meurtre fondateur » sur lequel s’est bâtie l’identité nationale. Ceci n’est qu’une proposition car on trouve tant de meurtres fondateurs dans l’histoire que la nausée n’est pas loin.

Il faudrait se demander s'il y a une leçon à tirer de cette triste épopée cathare; l'on pourrait méditer si l'on peut soi-disant libérer l'homme du mal et le lui faire prendre conscience par la force.
Il faudrait se demander si l'on peut imposer à quelqu'un un totalitarisme religieux ou politique...


Ishtar




Posté le 2007-02-28
à 09:54


Réponse de Myrcan de Jokrind


Bonjour Ishtar, bonjour Athanor, bonjour lecteurs,

Cette intervention est justifiée par les questions d’Ishtar autant sur le fil de « Noir, l’arc-en-ciel » que sur celui de « La pierre des damnés » d’Erik Barussaud
Je pourrais l’intituler : « Genèse des Esotérismes ? »

On constate que dans les deux fils, l’auteur a un parti pris visant à illustrer de façon sensible pour son lecteur (auditeur spectateur dans le cas de « Noir, l’arc-en-ciel ») des aventures, émotions, comportements, démarches individuelles ou collectives. Dans les deux cas l’objectif porté par la rédaction n’est pas de procéder à une thèse historique mais néanmoins s’appuie sur une bonne enquête.

Ishtar dans ses requêtes tente de retrouver à l’intérieur des œuvres un écho à sa propre perception des périodes en question au travers des sa grande culture (passion et soif) des ésotérismes.
Les templiers ont-ils tenté de bâtir une synthèse entre l’islam et le christianisme ?
La Quête du Graal est elle un pilier des rituels Cathare (notamment le consolamentum).
Y a-t-il un lien étroit entre les Gnostiques les Templiers et les Cathares (ce que nous en connaissons) et les évènements historiques relatés dans ces textes ?


J’ai envie de répondre par la négative.
Bien sûr on ne peut raisonnablement pas douter que des contacts entre les sensibilités Templier et Cathare aient eu lieu. Le chevauchement des périodes induit des interférences nécessaires entre les hommes. Mais de là à projeter des « convergences délibérées » entre les mouvances, cela me semble un défaut de réglage du télescope (image que je prenais au début de ce forum).

Par ailleurs les « déroulements » respectifs de ces deux phénomènes sont suffisamment riches en eux-mêmes pour que l’on se contente de chacun séparément. Les interférences réciproques n’apportent pas vraiment d’éclairage supplémentaire. La réflexion sur les convergences et similitudes est toutefois passionnante « pour nous » a posteriori. Retrouver des harmoniques entre les expressions des uns et les textes des autres est intéressant. Mais attention à ne pas prendre pour des harmoniques ce qui relève simplement de l’atmosphère globale dans laquelle les phénomènes se sont produits (du dixième au quatorzième siècle)
.
Les réponses d’Ishtar à mes questions naïves, évoquent forcément de nombreuses voies d’interprétation mystiques ou initiatiques. On y retrouve l’Orient, ‘les chakras’ ; la correspondance entre une représentation du corps humain avec celle du Cosmos.
On y retrouve le Zen (le serpent qui se mord la queue est très proche du symbole du Yin et du Yang)
Est-il intéressant de savoir si les Parfaits pratiquaient le Yoga, la méditation ?
Avaient-ils eu des contacts avec les bouddhistes ?
Cette convergence apparente vient-elle de l’origine persane du Manichéisme cathare, elle-même peut-être liée à l’Inde via la Perse ?
La croyance en la réincarnation suivait-elle cet itinéraire ? Il existe une littérature abondante et même débordante sur ce sujet.


J’ai dans mes cartons l’essai d’un auteur anglais qui évoque des transes hypnotiques de la patiente d’un psychiatre. La patiente anglaise se met à parler couramment l’occitan qu’elle ignore par ailleurs et incarne une femme qui (vérification faite) a réellement existé à l’époque de la croisade. Cette femme s’appelait Fabrissa (c’est le nom d’un des personnages de « Noir, l’arc-en-ciel »). Je n’ai nullement essayé de faire un portrait de cette femme, dans la pièce, même si j’ai emprunté son nom.
On pourrait aligner des pages de questions de ce genre et trouver des rapprochements plus ou moins séduisants pour l’esprit avec des analogies qu’il ne faudrait pas prendre pour des preuves.

Je suis persuadé que toutes ces questions ne préoccupaient que très partiellement les populations de l’époque et surtout pas le rapprochement possible entre des mythologies que ces populations ignoraient forcément.

La violence gigantesque de l’agression du NORD, la ténacité de la résistance des faydits et des populations sont aussi éloignées de l’ésotérisme contemporain que les chapelets d’attentats en Irac sont éloignés des prédictions de Nostradamus ou des cahiers des Témoins de Jéhova.

EN REVANCHE une question m’apparaît excitante pour l’esprit et le débat.
Pourquoi ces épopées, des Templiers, de la croisade contre les Albigeois notamment, sont-elles systématiquement enveloppées des attributs de l’ésotérisme ?
C’en est au point que ces attributs occultent la réalité historique aux yeux du grand public. L’inconscient collectif est aveuglé par les fumées de souffre et salive aux odeurs de bûcher et de batailles habituellement rattachées à ces lointains évènements.

J’ai une hypothèse. Mais je la garderai pour une future intervention, laissant à Ishtar et à d’autres le soin de réagir à mes assertions de lourd rationaliste souvent ignare.


Chère Ishtar, dans votre réponse à ma dernière intervention, vous avez un peu modifié le contexte des questions posées.
Pourquoi tous ces développements à propos du GRAAL dans ce forum sur les Cathares ?
Je parlais seulement de mes propres bavardages et plaçait cette question en articulation.
Je crois avoir lu que le symbole du Graal n’est apparu dans la littérature qu’au douzième siècle même si le mot a des origines étymologiques possibles antérieures. Les Cathares ont peut-être réutilisé ce symbole lorsqu’il est apparu dans l’harmonie de l’époque.

Quand à la seconde question, elle établissait une échelle entre le GRAAL et l’Epopée Cathare en disant que celle-ci à la différence de celui-là, n’est pas tombée dans le « domaine public » des mythes et des civilisations en construction.

Merci de votre lecture.
Amicalement.

Myrcan de Jokrind




Posté le 2007-02-28
à 12:18


Intervention de Atanator


Le pseudo Atanator appartient à Erik Barussaud, auteur de "La pierre des damnés" sur Alexandrie on-line.


Bonjour à tous.

Pour rebondir sur ce que vient de poster Myrcan de Jokrind, et comme j'ai eu l'occasion de le préciser par ailleurs, je n'ai pas pour dessein d'apporter ma théorie sur l'histoire des Cathares, des Templiers et autres "mouvances" contemporaines. Je garde mes convictions et mes rêves pour moi (pour le moment).

L'intrigue de mon ouvrage "La pierre des damnés" n'est là que pour éveiller des curiosités et ouvrir des portes sur les questionnements liés à certains secrets et au trésor que l'on dit avoir appartenu à l'Ordre du Temple.

Certes des croisements et des rapprochements naquirent entre ces mouvements mais "La pierre des damnés" se situe en 1313 ; période qui n'a rien à voir avec celles évoquées sur ce fil. Bien sûr, nous retrouverons des réminiscences tout au long de cette aventure, mais elles feront route avec des liens Celtes, Wisigoths, Romains, Juifs, Écossais, etc.

Pour connaître un peu l'ésotérisme mais insuffisamment, je pense que ce sujet n'a pas grand chose à voir avec ce fil.

Attendons de prendre connaissance des extraits mis à jour de "La pierre des damnés" et nous donnerons du grain à moudre au fil prévu à cet effet.

Bien amicalement.


Atanator
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Rappelle à ton ennemi que tu as de la mémoire.




Posté le 2007-03-01
à 10:01


Réponse de Ishtar



Myrcan_de_Jokrind a écrit :
EN REVANCHE une question m’apparaît excitante pour l’esprit et le débat.
Pourquoi ces épopées, des Templiers, de la croisade contre les Albigeois notamment, sont-elles systématiquement enveloppées des attributs de l’ésotérisme ?
C’en est au point que ces attributs occultent la réalité historique aux yeux du grand public. L’inconscient collectif est aveuglé par les fumées de souffre et salive aux odeurs de bûcher et de batailles habituellement rattachées à ces lointains évènements.

Vraisemblablement parce qu'il y a beaucoup de zones d'ombre dans l'histoire des Cathares comme dans celle des Templiers.
Il est certain que les diverses hypothèses émises contiennent sans doute beaucoup plus de parts de rêve que de faits avérés mais même derrière les plus folles d'entre-elles, il est souvent des parcelles de vérité à débusquer, n'en déplaise aux rationalistes forcenés (sourire taquin)

Ishtar




Posté le 2007-03-16 11:45
à 11:45


Intervention de Myrcan de Jokrind


Cher lecteur, Bonjour,

Pour relancer un peu ce fil qui sommeille doucement, je voudrais rappeler trois des récentes interventions en reprenant ci-dessous un extrait de chacune.
Puis, je développerai une hypothèse relative à la génération des théories ésotériques. Celle-ci pourrait s’appliquer au Catharisme et à l’engouement qui se développe en son nom. La pièce « Noir, l’Arc-en-ciel » n’a aucun lien avec ce domaine et c’est justement pourquoi je tenterai ce développement.
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L’Epopée Cathare a été initiée par le sac de Béziers. Cet IMMENSE MASSACRE a fondé dans le sang un épisode tragique qui a vu s’affronter et mourir des dizaines de milliers d’hommes et de femmes.
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Je suis convaincu que la transmission, le passage, de cette émotion est une clé des œuvres. L’écriture procède donc à la simplification en remplaçant des faisceaux complexes de faits par des traits romanesque ou poétiques ou les deux.


Parmi les sujets volontairement écartés de l’ouvrage, figure l’ésotérisme avec son lot de signes, de théories, et d’analogies approximatives.
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Le GRAAL est un artéfact littéraire en quelque sorte tombé dans le « domaine public » des mythes et des civilisations en construction.
Ce n’est pas le cas de l’Epopée Cathare.
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Sur Les Esotérismes.
Je dispose sur mes étagères d’un ouvrage que m’avait confié un ami dans les années soixante dix. Cet ouvrage de l’après guerre s’appelle « La défense de Will ». Il développe avec intelligence et pugnacité une hypothèse selon laquelle premièrement le nom « William Shakespeare » serait un alias, deuxièmement l’œuvre connue sous ce nom serait en fait de Francis Bacon, et enfin les premières éditions de l’œuvre seraient parsemées de signes dissimulés dans la graphie elle-même et qui révèleraient la supercherie en rendant à qui de droit ce qui revient à Francis Bacon.
On s’y livre donc à des études systématiques et minutieuses des coquilles, des répartitions des mots, des espaces normaux et des espaces suspects entre les impressions, des groupes de lettres les uns par rapports aux autres. Un invraisemblable entrelacs des signes et de sens cachés expurgé des textes imprimés. Le nom de l’auteur (un certain F. Bonac-Melvrau) est lui-même une anagramme de BACON.
Il sélectionne les signes qui pèsent dans le sens de l’hypothèse. Il multiplie les exemples et la démonstration parait évidente, irréfutable. Impressionnant ! C’est ce que j’appelle les analogies approximatives.
On peut toujours trouver dans un champ quelconque du savoir, des propriétés qui finissent par faire sens et que l’on identifie à la théorie particulière que l’on recherche ou que l’on désire !


L’Astrologie, l’Alchimie, la Kabbale, tous les ésotérismes, les divinations anciennes et modernes relèvent de ce mécanisme.
Parfois ces théories s’appuient sur des langages particulièrement convaincants, voire scientifiques. C’est le cas par exemple de la Numérologie, du Yi-King, de l’Astrologie.
Peut-on admettre que la chance ait pu sourire à tel ou tel de ces domaines, pour qu’il croise par hasard une certaine réalité concrète ? En raison même de cette tolérance coupable chaque ésotérisme revendique le rang de connaissance universelle, de mystique, de science. Les allées du temple sont jonchées par les charlatans de colifichets et de gris-gris.

L’exemple du Yi-King est une bonne illustration. Il utilise une représentation typiquement binaire. Ses huit directions correspondent aux huit arrangements possibles de deux valeurs sur trois positions.

0 -> -o- -o- -o-
1 -> -X- -o- -o-
2 -> -o- -X- -o-
3 -> -X- -X- -o-
4 -> -o- -o- -X-
5 -> -X- -o- -X-
6 -> -o- -X- -X-
7 -> -X- -X- -X-

Un quelconque de ces arrangements étant obtenu par une méthode aléatoire (les bâtons jetés sont de même nature que des dés) permet une immersion dans un corpus de textes qui sont des maximes où chacun retrouve nécessairement une partie de son expérience intime.
Les tarots, les cartes, les radiesthésies en tous genres utilisent des principes analogues. Dans le cas du Yi-King on pourrait même retrouver une correspondance géométrique ou géographique par projection des huit secteurs sur la rose des vents.

Les modes opératoires ou de représentations étranges sont convaincants parce que étranges (Des dés, des pendules, des viscères, des taches, des jets d’objets ou de liquides, des correspondances géométriques). Ils mettent en jeu le hasard ou des propriétés subtiles que l’on considère comme dépositaires d’un savoir sous-jacent et obscur mais révélé par les règles, par les lames, les figures, les maximes morales ou des textes mystiques.

L’étrangeté des modes opératoires conjuguée à l’empathie envers les textes ou les symboles nous séduit et nous installe dans une émotion confortable.

Plus que la vérité ou la fausseté des propositions ésotériques, les questions que j’ai envie de poser sont :
« Pourquoi ces théories, rites et comportements apparaissent-ils ? » et « D’où vient le succès qu’ils obtiennent dans les imaginaires populaires ? »
Ces questions ont peu à voir avec ce qu’étaient les Cathares mais beaucoup avec la façon dont ils sont perçus et considérés depuis le dix-neuvième siècle.

Je ne mets pas en balance tous les ésotérismes rassemblés face à la simple horreur de condamner au supplice et à la mort sur le bûcher un seul homme en raison de ses opinions ou de sa foi. C’est pourquoi je pense utile de poser ces questions et d’amorcer des embryons de réponses.
Pour ne pas alourdir, je tenterai ce chantier lors d’une future intervention.

Merci de votre lecture.

Amicalement,

Raymond Derynck.




Posté le 2007-03-26
à 16:10


Intervention de Myrcan de Jokrind


Bonjour cher lecteur,

Voici le développement annoncé dans les interventions précédentes. On s’accroche, mais on garde l’esprit critique. Eventuellement, on y revient.

Esotérisme et Sacré.

René Girard
« La facétie des enthousiasmes de groupe produit les effets dévastateurs de la haine et de l’exclusion à l’origine de toutes les religions et de la plupart des systèmes de pensée qui cimentent les sociétés humaines. »

Cette proposition de mon cru est une sorte de résumé approximatif de l’anthropologie élaborée aux Etats-Unis par l’académicien français René Girard.

La pensée de René Girard s’est développée dans la seconde moitié du 20° siècle selon trois grandes étapes concrétisées par quelques textes fondamentaux autour du « Bouc-émissaire », notamment :
« Mensonge romantique et vérité romanesque »
« La violence et le sacré »
« Des choses cachées depuis la fondation du monde »

On trouve sur le net et dans les bonnes librairies tout ce qu’il faut pour investir cette pensée. Mais à titre d’exercice en ce qui me concerne, j’essayerai ici de la décrire un peu, au-delà du résumé approximatif ci-dessus.

La MIMESIS ou le rôle de l’imitation dans nos comportements

Le désir à l’origine de tout mouvement peut toujours être décrit par le biais de l’imitation.
On ne désire jamais que ce qui nous est désigné par un modèle. Les attributs particuliers du modèle relativement au « sujet désirant » caractérisent les formes de la mise en mouvement du désir. (Episodes des histoires, des contes, des romans, des scénarii) :
Fascination mystique et respectueuse pour la divinité modèle.
Fascination violente à l’encontre du rival modèle.
Confusion, superposition, oscillation entre l’image du rival et celle de la divinité.

La littérature romanesque est une tentative pour mettre en jeu les mécanismes du désir voire pour repérer et dévoiler ces mêmes mécanismes (les mettre à jour).

La manifestation collective du désir mimétique

La diffusion des mécanismes d’imitation au sein d’un groupe humain provoque une démultiplication du modèle. La réaction en chaîne qui s’en suit constitue une déflagration violente. La crise provoquée par la violence propagée épuise et ruine la collectivité. Ce phénomène est baptisé Crise MIMETIQUE par René Girard. Le palliatif découvert par les sociétés humaines pour se protéger de la destruction consiste à procéder à une « condensation » de tous les modèles-rivaux en la personne d’un seul individu. Celui-ci devient dès lors la cible de toutes les vindictes individuelles en même temps qu’il est potentiellement porteur de toute la fascination. C’est le Bouc-émissaire. La crise mimétique se résout en un sacrifice-lynchage où les consciences se noient et au terme duquel la crise étant dissoute comme par miracle, le souvenir du sacrifié devient porteur des attributs positifs de la divinité.

L’efficacité sociale du sacrifice réside dans sa capacité à protéger le groupe humain le plus longtemps possible contre la survenue d’une nouvelle crise mimétique.
Le sacrifice doit donc être perpétué dans le temps. Pour cela on doit pouvoir l’évoquer, y faire référence, en rappeler les vertus. Mais jamais on ne doit révéler son caractère factice ou mécanique car alors la capacité salvatrice de la divinité modèle disparaît et la crise mimétique refait surface.

C’est le rôle des légendes, des mythes, des rites, que de répéter des histoires de héros qui ne sont que l’image positive d’un lynchage toujours dissimulé derrière les récits. Et c’est ce lynchage qui fascine. En ce sens le premier lynchage, constitue un « meurtre fondateur » de la société en question. On trouve donc à l’origine de toutes les cultures, des histoires de Dieux ou de Héros, victimes du destin ou d’aventures étranges. Ces aventures ne sont que les masques ou les théâtres qui dissimulent les péripéties d’un lynchage qu’il faut impérativement évoquer mais dont il convient nécessairement de mettre la violence à distance.
Voilà donc comment le sacré a partie liée avec la violence collective. Voilà donc comment l’anthropologie des mythes et des textes sacrés offre un formidable champ d’investigation pour repérer les signes des origines violentes des sociétés.


Mais que faire de la victime du Lynchage ?

Elle n’y est pour rien, elle ! Elle a été désignée presque au hasard en raison d’attributs fortuits au moment de la crise mimétique. Elle est plus jeune. Elle est plus vieille. Elle boîte. Elle boit. Elle a une autre couleur, elle est plus faible, ou elle est en position de pouvoir apparent etc…

Il y a un lent mouvement au sein des corpus sacrés (textes religieux) qui vise à mettre en lumière le phénomène qui nous occupe. Cette révélation est dangereuse car elle débouche presque nécessairement sur la réapparition de la crise mimétique.

Il nous est devenu intolérable d’assister ou seulement d’évoquer la mise à l’index injuste d’un individu ou d’un groupe par les effets hasardeux de crises mimétiques. C’est la puissance de révélation des textes qui a ouvert une telle indignation.
La dernière thèse de René Girard, la plus controversée est que le vecteur le plus puissant de cette révélation n’est autre que l’Evangile Chrétienne où l’histoire elle-même raconte sans fard que le sacrifié est innocent face à une collectivité coupable. L’ancien testament serait une lente maturation vers cette révélation (Abraham dont la main meurtrière est détournée vers un bouc). On sait avec quelle insistance cette histoire est perpétuée ne serait-ce que dans la culture musulmane jusqu’à aujourd’hui.

Pour ma part j’ai découvert cet auteur (René Girard) plus de trois ans après avoir terminé l’écriture de « Noir, l’arc en ciel ». Mais je n’ai pas pu m’empêcher de trouver des résonnances dans ses thèses avec ce qui m’avait occupé lors de la rédaction, à l’occasion de la réalisation du spectacle et même après.
L’essentiel des critiques faites à René Girard par la communauté universitaire française se ramène à sa carrière faite aux US et à son propre rattachement affirmé à l’église Catholique.

Pourtant, que René Girard se revendique chrétien ou non croyant, ne change rien à la pertinence vertigineuse de sa description. On voit se dérouler concrètement jour après jour sous nos yeux les innombrables illustrations de ses grands thèmes : La fascination mimétique qu'offre de la puissance occidentale pour les terrorismes de tout poil.
L'imitation fulgurante des destructions violentes de la part des va-t-en guerre américains. Le bouc émissaire constitué par l'ex dictateur ignoble qui après avoir été le dépositaire de toutes les haines devient pour son peuple le dépositaire des bannières du combat contre les GI's qui deviennent à leur tour les dépositaires de l'image de la violence.
Les tortionnaires américains (femmes comprises) qui se livrent à des sacrifices symboliques des détenus. La frénésie mimétique vers la disposition du feu atomique.
Les églises sont désormais de peu de poids face à ce rouleau compresseur de notre mode de fonctionnement collectif. Leur unique action est l'exploitation de cette mécanique de foule au profit des gourous de toute pèlerine.

Le processus de « révélation » est à l’œuvre dans notre collectivité planétaire moderne. Il n’est plus pensable depuis Galilée et Newton de diffuser des contes ou des mythes qui soient vraiment efficaces contre la crise mimétiques. Pourtant la nécessité de maintenir la violence (la peur) à distance de la psyché subsiste à toutes les échelles (universelle, collective ou individuelle).

Et l’Esotérisme dans tout ça ?

C’est là que je case mon hypothèse relative à l’apparition des ésotérismes.

Il est une évidence que tous les ésotérismes revêtent un costume de mystère, de langage secret, de conventions et de signes auxquels il est nécessaire d’être initié pour pouvoir accéder au sens caché. Il y a toujours un sens caché. Les initiés d’ailleurs ne sont pas plus détenteurs de savoir puisqu’ils reconnaissent devoir accomplir une quête pour accéder à l’illumination finale à laquelle ils aspirent. Mais la communauté des initiés (le collectif) se retrouve autour du langage particulier, autour du code. C’est une façon de s’isoler ou de se protéger du monde des non-initiés.
La présence insistante de mystère et de dissimulation dans les codes ésotériques est un signal, une alerte qui manifeste qu’il y a nécessité de mettre à distance, de protéger la conscience contre une lumière trop crue. Cette lumière sournoise diffuse pourtant et fascine. Il suffit de constater l’engouement pour le dernier avatar ésotérique que constitue « le code de Da Vinci » pour soupçonner l’ « éblouissement des consciences » que continue à représenter le « Bouc-émissaire » en chef ; le Christ.

Cette fonction de mise à distance ressemble trop à notre description du « meurtre fondateur » qui est caché dans les replis des mythes et des rites des sociétés humaines pour s’autoriser à en faire l’économie.

Dans notre Forum relatif à une pièce de théâtre « Noir, l’Arc-en-ciel » sur les Cathares nous avons été amenés à parler des Templiers.
Ces deux péripéties de l’histoire de France ont été caractérisées par une violence faite à un groupe d’hommes même si l’épopée Cathare est plus proche d’un ethnocide. Dans les deux cas, ce qui subsiste de ces épisodes dans la conscience populaire c’est la suspicion de savoirs occultes dont les cathares et les templiers auraient été les détenteurs. Les mystères qu’il faut élucider et les trésors cachés qu’il faut méthodiquement retrouver le seront par une initiation.

Serait-ce décent de parler des Rwandais, des Cambodgiens ou des Arméniens comme les détenteurs d’un savoir spécial qui aurait disparu avec eux et dont il faudrait retrouver les cheminements. Non, il y a eu meurtres massacres assassinats. Les assassins sont collectivement responsables. Et d’une certaine façon nous reproduisons quotidiennement ces meurtres et ces assassinats en détournant nos yeux de cette vérité au profit de contes et de mythes obscurs mais confortables. Les Bovarismes ésotériques sont un peu de même nature que les feux des désirs de la vie mondaine d’Emma Bovary. La conquête du désir ne passe pas par sa satisfaction mais par son élucidation.
Ceci est une hypothèse. Elle mérite je crois la réflexion et je la soumets au lecteur.

Merci de votre lecture.
N’hésitez pas à y revenir, à corriger ou à rebondir.
La prochaine fois on parlera des Cathares.

Amicalement,


Myrcan de Jokrind
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"Ceci n'est pas pour la foule, mais pour toi, car nous sommes l'un à l'autre un théâtre bien assez grand"
Epicure.
"Les rêves n'ont aucun caractère divin ni aucun pouvoir divinatoire ; ils sont dus à l'envahissement des simulacres"
Epicure.




Posté le 2007-03-26
à 16:57


Intervention du Jardinier


Bruno Leclerc du Sablon, dont le pseudo est jardinier allie des qualités littéraires et poétiques riches à une rigueur scientifique. Il a produit de nombreux ouvrages sur Alexandrie et nourrit un blog personnel.


Je débarque dans cette discussion passionnante et n'ai lu que très cursivement tous les échanges, sans m'y attarder. J'avais lu "Noir, l'arc en ciel" il y a quelques jours et avais manifesté mon vif intérêt à Raymond. "SUPERBE", votre pièce, lui avais-je même dit avant que nous nous tutoyions.
J'ai beaucoup lu sur les Cathares. C'est une histoire qui à la fois me passionne, me taquine aussi, par certaines fibres ou divers gènes de souche occitane, m'interpelle enfin, quand, catholique pratiquant, je vois le rôle majeur joué par Dominique, l'espagnol et, dans une moindre mesure, par François, d'Assise : deux figures primordiales de l'Eglise d'aujourd'hui.
Le voeu d'obeissance était-il donc si puissant ? Ou bien les moyens de communication était-ils si tenus et contrôlables qu'on pouvait ne laisser passer que les messages qu'on voulait ?
Raymond, as-tu une idée là-dessus ? Ou Carine ?

Bruno

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Je désire être le témoin de ce qui dure contre ce qui donne l'illusion de durer.
Georges Bernanos




Posté le 2007-03-28
à 10:27


Réponse de Myrcan de Jokrind


Bruno,

Le rôle de Dominique lancé sur les chemins Cathares, était de manifester que l"ordre "catholique" et la pensée Vaticanne pouvait se justifier et faire contre-poids à la pensée considérée comme hérétique. Pour ce faire il allait de soi que les diffuseurs de cette parole ne devaient pas s'associer à l'image de la corruption qui caractérisait le clerger catholique en Longuedoc. C'est toute la vertu de Dominique que d'avoir "joué au Parfait" mais avec le discours du Pape pour contrebalancer les discours hérétiques portés par des femmes et des hommes rayonnant de simplicité et de compassion.

Ce n'est que dans un second temps que l'ordre Dominicain a été le bras juridique et le tuteur de l'Inquisistion de triste mémoire et de longue vie, rebondissant de période en épisode jusqu'en Espagne pour justifier l'injuste et les tortionnaires, les bûchers et les geoles qui inspirent encore les pires dérives de l'humanité.

Quand à Saint François d'Assise, j'avoue ignorer s'il a interféré avec les hérésies. J'en garde seulement de mes années chez les frêres maristes (pas un très bon souvenir), l'image d'Epinal de celui qui parlait aux oiseaux. Un peu comme l'autre marchait sur les eaux.


On raconte que Dominique aurait placé une Bible dans un feu pour montrer qu'elle n'était pas agressée par les flammes. C'est donc la preuve miraculeuse de la vérité de son message. On notera que les Cathares, eux, brûlaient très bien ...

Je ne comprends pas très bien le sens de ta question finale. Quel rapport établir entre voeu d'obéissance, contrôle de la communication et des messages. A quels messages fais-tu allusion ? Peux-tu préciser ?

Amicalement,

Raymond Derynck




Posté le 2007-03-28
à 19:19


Réponse du Jardinier


Raymond,

A propos d'obeissance, je voulais parler d'obéissance au pape. Il est vrai que l'ordre n'était pas encore fondé, mais le père Dominique n'en devait pas moins obéissance, quelque furent ses idées personnelles :
"le pape me dit d'aller prêcher contre l'hérésie, alors je vais prêcher contre l'hérésie, même si je pense que tout n'est pas mauvais chez ces gens là," se serait dit Dominique (???)

A propos de communications, je pense que déjà, à l'époque, on pouvait gagner non seulement par les armes mais aussi par les informations qu'on diffusait. Il est évident que les croisés et les délégués du Saint-Siège avaient des moyens, dans ce domaine, que ni les Bonhommes, ni même les Parfaits, n'avaient.
Mais je me trompe peut-être. L'intox est peut-être une découverte guerrière plus récente.

Je ne reviens pas sur les dominicains et l'inquisition car je ne sais plus si Dominique s'en était occupé personnellement. Mais ça vaut le détour.
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Je désire être le témoin de ce qui dure contre ce qui donne l'illusion de durer.
Georges Bernanos




Posté le 2007-03-28
à 20:21


Réponse de Myrcan de Jokrind


Bruno,

De mémoire, mais des vérifications devraient être faites avant de prendre ça comme "évangile", Dominique a été sollicité par le Pape, mais sa sincérité était grande et aussi son désir d'accomplir cette mission.
S'il a été choisi c'est justement en raison de sa notoriété d'homme intègre et de bonne volonté. Les débats contradictoires (les premiers) n'étaient pas nécessairement des pugilats. Au début, les tournées sont un peu comme des missions de bons offices que pouvaient tenter les autorités françaises pour convaincre les premiers adeptes de l'indépendance en Indochine ou en Algérie.

Mais à la longue leur échec effectif exaspéraient les autorités Romaines. Jusqu'à l’assassinat de Pierre de Castelnou (légat du Pape) à Saint Gilles. Là ça commençait à bien faire et à sentir le roussi.

Pour la diffusion des informations, je n'ai pas d'information sur des organes officiels de propagande ou de quelque chose qui pourrait en tenir lieu.

La première Croisade
Après une descente Cahin caha le long de la vallée du Rhône, le Sac de Béziers a surpris tout le monde (même les Stratèges). Et l'information s'est alors répandue comme une trainée de poudre.

D'un côté les Chefs de la croisade ont profité de la propagation de la terreur pour pousser leurs pions et avancer le plus vite possible jusqu'à Toulouse.
D'un autre côté les cités du Sud ont été paralysées et ont décidé de ne pas livrer les Cathares soit en les défendant et en résistant à un siège, soit en accueillant les croisés mais en permettant aux Cathares de s'enfuir vers l'Ouest avant l'arrivée des armées. C'est cette option qui a été prise à Narbonne. "Noir, l'arc-en-ciel" évoque donc cet épisode dans les scènes de l'atelier de tissage et dans la visite cynique que Flaoune fait faire aux trois français ivres.

La stratégie des messagers

La scène des Chevaliers Français dans le seconde partie de "Noir, l'arc-en-ciel" évoque un réseau de communication entre des places fortes pour établir un filet de sécurité. Cette démarche a bien pût se passer. Elle est probable et de bon sens, mais je l'ai totalement inventée pour montrer des combattants pragmatiques dont la foi n'est pas la motivation, mais l'efficacité. Des "managers".

Merci Bruno, par ta question, d'avoir ramené le sujet sur les Cathares et sur le théâtre.
Amicalement,

Raymond Derynck.




Posté le 2007-04-06
à 12:05


Intervention de Myrcan de Jokrind


Bonjour cher lecteur,

Histoire et Cosmologie, le cadre du débat
Pour consolider ce forum, il apparaît qu’un lecteur a priori indifférent à la chronologie des événements historiques et à l’histoire des religions trouve tout de même à s’interroger sur les universaux de cette épopée Cathare qui nous occupe. Il peut souhaiter resituer cette masse d’information dans un cadre un peu clair.

De tels développements à proscrire dans le fil d’une pièce de théâtre deviennent éventuellement utiles dans le forum à propos d’un texte concerné par l’histoire.
Aussi je suggère qu'à l'occasion des quelques interventions à venir, on puisse rappeler, ou résumer ce qu’il est utile de connaître dans les trois domaines suivants.


La filiation, ou la généalogie de la religion Cathare (les origines du manichéisme, les cheminements historiques empruntés par cette catégorie de croyance, et la façon dont ces convictions sont parvenues jusqu’au sud de la France)

Le contenu du ou des manichéismes (quelle est la cosmologie, en quoi elle ressemble aux modes de pensée de référence (christianismes) et en quoi elle s’en écarte, en quoi les consciences peuvent s’impliquer dans ces croyances)

Les principaux événements qui jalonnent la grande période historique évoquée par la pièce « Noir, l’Arc-en-ciel » : la première moitié du treizième siècle.



Ces sujets sont bien entendu traités dans la littérature et sur la toile, mais peut être, ce qu’espèrent certains lecteurs, c’est de trouver dans ce forum un « paquet cadeau d’itinéraires » qui puissent jalonner leur découverte et les aide à investir le sujet.


Paradoxalement c’est après de nombreux développements que cette nécessité est exprimée. Je dirai que c’est le lot des forums informels que de ne pas obéir à une forme précise.
KISEKISICOL

Ayant déjà consacré pas mal de salive dans le cadre de ce forum, je passerais volontiers le flambeau si certain ont envie de s’y coller. Toutefois je peux aussi bien continuer tranquillement au cours des prochaines semaines à me coltiner cet exercice au risque d’avoir le sentiment de faire tourner en rond un monologue.

Le plan étant tout fait, il n’y a plus qu’à …

En attendant vos réactions, questions ou suggestions.

Amicalement


Myrcan de Jokrind




Posté le 2007-04-16 11:55
à 11:55


Intervention de Myrcan de Jokrind


Bonjour cher lecteur,

Voici le début des développements évoqués dans la précédente intervention.

Généalogie de la religion Cathare


L’idée centrale de la forme de croyance à laquelle se référaient les Bonshommes, c’est le dualisme. En cela la religion des Cathares n’est pas une hérésie (déviance par rapport au dogme chrétien et spécialement catholique) mais bel et bien un courant de pensée distinct et parfaitement original.


Six cent avant JC à deux cent cinquante après (Huit siècles)

L’origine des dualismes se situe dans la Perse antique au-delà du sixième siècle avant JC. Zarathoustra qui vivait très probablement à cette époque a structuré les rituels et la mythologie de la religion Mazdéiste par emprunt à des croyances antérieures venant de l’Indus ou remontant au troisième millénaire avant JC.
Mazdéisme car la divinité centrale de cette croyance est appelée Mazda. Il représente la lumière, le bien, la bonté, l’être. S’oppose à Mazda une divinité des ténèbres, du mal, du néant et de la haine qui porte le nom d’Ahriman.
Le monde serait le résultat de la lutte entre ces deux divinités. On développera un peu cette idée dans une intervention à venir. Notons qu’une des religions qui a pu influencer le Mazdéisme de Zarathoustra s’appelle le Zervanisme. Dans cette dernière, les deux divinités seraient elles mêmes le produit d’une entité génitrice unique, le Temps.

Le Mazdéisme avec une mythologie simple et cohérente est capable d’expliquer la présence lancinante du mal constaté par les hommes. Par ailleurs, les rites simples (sans sacrifice) mettent cette croyance à la portée de tous, contrairement aux religions qui ne s’adressent qu’aux élites aristocratiques des civilisations antiques. A la suite de son initiation première par Zarathoustra, le courant Mazdéiste va donc occuper le moyen orient pendant plus d’un millénaire. Jusqu’à la survenue de l’Islam

On note une influence forte du Mazdéisme sur les mythologies et les pratiques Hébraïques et une partie importante des récits bibliques sont des emprunts au Mazdéisme de Zarathoustra.

Au début de l’ère chrétienne le moyen orient est parsemé de nombreuses sectes. Le « new âge » de l’époque (en français « nuages ») qui s’organisent autour des croyances hébraïques et de leurs évolutions. Une des vertus de ces sectes et de procéder à une abstraction de plus en plus forte des mythes et d’organiser les rituels autour de comportements qui doivent aboutir à la purification des individus dans la perspective d’une transcendance. La recherche du « Savoir » a conduit les autorités chrétiennes puis catholiques à dénommer les adeptes de ces sectes, les « gnostiques ». C’est au cœur de ce bouillonnement de théories religieuses que l’épisode chrétien a vu le jour.


Du troisième siècle au Huitième siècle

Reprenant les mythologies dualistes du Mazdéisme, intégrant le message d’amour du Christ et après un séjour en Inde où il a pratiqué et étudié le Bouddhisme, Manès fonde dans la première moitié du troisième siècle une nouvelle religion qu’on appelle le Manichéisme. Dans cette religion, les divinités du Mazdéisme de Zarathoustra deviennent des abstractions ou des Principes. Une cosmologie compliquée tente de rendre compte de la création et de l’existence du monde et du mal.
Dans la perspective de la défaite du principe du mal l’homme ne peut que participer à la purification sans avoir le pouvoir ni la maîtrise, la responsabilité ni la culpabilité de son destin. A la différence des sectes gnostiques qui restaient confidentielles, le manichéisme connaît dès sa naissance un large essor grâce notamment à l’accueil qu’il rencontre auprès des politiques.

En un siècle on en retrouve des foyers dans le pourtour méditerranéen et jusqu’aux confins de l’Europe.

Mais dans un retournement, à la suite des morts successives de deux souverains, les manichéens deviennent les victimes des massacres et de la vindicte des prêtres de l’église Mazdéiste. Manès fera les frais de ces premières persécutions, inaugurant le chapelé des exterminations qu’ont dû subir les manichéens au fil du temps et des régions, jusqu’aux Cathares du Sud de la France au treizième siècle.

La fluidité de la diffusion de cet enseignement n’a d’égal que la pugnacité de ses exterminateurs. De sorte que les nombreux foyers apparaissent et sont détruits. Les croyant se fondent plus ou moins dans les pratiques « orthodoxes » (un peu comme les futurs maranes, juifs espagnols déguisés en pratiquants catholiques pour se dérober à l’inquisition).


Du huitième siècle aux Cathares
Deux contre exemples viennent infirmer cette règle.
Les Pauliniens implantés non loin de l’Arménie actuelle qui ont vu leur puissance perdurer contre les agressions jusqu’au Huitième siècle.

Les Bogomiles en Bulgarie et dans les Balkans jusqu’en Bosnie pour lesquels le dualisme a constitué la religion officielle depuis le neuvième jusqu’au quinzième siècle. On a put expliquer cette persistance dualiste dans ce lieu par la situation à l’interface exacte entre plusieurs influences religieuses (la catholique, l’orthodoxe byzantine et l’islam).

La religion des Bogomiles est en définitive très proche de la foi des Bonshommes, et l’organisation des églises Bulgares figurera un modèle pour celle des églises Cathares.

La proximité de la péninsule italienne et l’essor du commerce à la fin du premier millénaire servira de vecteur à la diffusion de la foi dualiste vers l’occident de l’Europe. Il y aura même des échanges entre les organisations manichéistes voire des conciles réunissant des manichéens du sud de la France et du nord de la péninsule italienne.

Partout dans le sud de l’Europe des foyers dualistes se développaient avec d’autant plus de force que les pouvoirs politiques (cités indépendantes et riches) rejetaient les interventions de l’église papale comme d’insupportables interférences avec le pouvoir local.

Quelques livres

« Albigeois et Cathares » de Fernand Niel Collection Que-sais-je PUF 1970. Numéro 689.
« Montségur et l’énigme Cathare » de Jean Markale Pygmalion
« L’Epopée Cathare » deux tomes de Michel Roquebert


Le site internet http://www.cathares.org/ permet de faire son marché, il est très riche et varié.

Noir, l’Arc-en-ciel

La pièce ne cherche pas à développer l’aspect « généalogie du manichéisme ».

Tout au plus les Bulgares (ou bougres) figurent parmi les noms d’oiseaux dont sont qualifiés les Bonshommes par le clergé catholique, et l’introduction de la pièce montre Flaoune comme un Monsieur Loyal dans les attributs approximatifs d’une divinité du «Temps» en référence possible au Zervanisme. Il n’y a aucune importance à ce que le spectateur acquière dans la durée du spectacle une connaissance de ces éléments.

En attendant vos réactions, questions ou suggestions.

Amicalement


Myrcan de Jokrind




Posté en 2012


Intervention de Myrcan de Jokrind


Cette intervention très tardive se place longtemps après quelques interventions qui elles, ont été perdues, (notamment le contenu du manichéisme des Cathares et les événements historiques liès à la croisade).
On doit pouvoir retrouver ces textes manquants auprès d'Alexandrie.com ou peut-être même de la NSA . . .




Face à la voute.



Au cours d'une de ces nuits chaudes et éblouies par le ciel, où l'identification des constellations semble nous plonger dans l'éternité maternelle, j'ai repensé à une question que j'avais posée à la cantonade sur un forum vieux de dix ans que j'avais voulu avec présomption baptiser "Catharisme et mécanique quantique".

La question s'adressait à un des intervenants du forum, physicien et astronôme. La question était une sorte de jeu de l'esprit mais qui nous immerge dans la poésie vertigineuse de l'histoire :

Quelle(s) étoile(s) de la voute du ciel est à une distence de la terre, telle que la lumière qui nous parvient a été émise au moment des événements historiques qui nous interressent?

Cette question était restée sans réponse écrite sur le forum qui s'est tû quasiment avec elle.

Aujourd'hui en consultant un petit ouvrage destiné aux amateurs j'ai trouvé la réponse.

"Rigel" étoile (béta) de la constellation d'Orion, (dont l'alpha est Betelgeuse), Rigel donc est une étoile située approximativement à 780 années lumière de nous.
La lumière qui nous arrive de Rigel est partie de cette étoile il y a autant de temps que celui qui s'est écoulé ici bas depuis que la croisade, l'inquisition et les bûchers sévissaient autour de Toulouse. Bien sûr la notion de simultanéité n'a pas de sens en physique, mais quel épice poétique !

Réciproquement si autour de Rigel une civilisation un peu plus avancée que la notre est capable d'observer la lumière en provenance du soleil et de sa banlieu, alors on peut imaginer que les astronômes de Rigel assistent en ce moment dans ces téléscopes particuliers aux aventures des feydits et des bonshommes. Quel spectacle !

On pourrait généraliser le jeu et coller sur chaque étoile de la voute une petit "post-it" qui nous indiquerait à quelle époque de notre histoire est parti la lumière que nous en recevons.

Quelques exemples :

Sirius : Début de notre vingt et unième siècle.
Vega : Mitterrand Président.
Aldébaran : Début de la seconde guerre mondiale
Antarès : Naissance de Gallilée.


Toutes ces étoiles appartiennent en quelque sorte à notre voisinage dans la Voie Lactée.

Pour remonter dans un passé préhistorique il faut naturellement s'éloigner beaucoup plus et sortir de notre Voie Lactée. Ce sont alors les nébuleuses et galaxies qui ponctuent les grandes époques. Les Noms de ces nébuleuses sont malheureusement beaucoup moins poètiques. Et au plus loin, c'est le Big Bang. Bien loin des cathares (ou pas).

Excusez la digression !!!

Bien des années plus tard (Août 2017) je croise dans la revue Ciel et Espace, un article exactement consacré à cette question et qui fournit de nombreuses réponses à des étoiles historiques.
Je suis bien étonné de cet article et gratifié d'être replongé dans cette quête qui donc n'est pas si absurde.
Se référer à cette revue pour consulter l'article s'il est toujours disponible.

Le temps faisant son office, les étoiles nous renvoient une lumière de plus en plus récente et les "post-it" doivent être réactualisés. Les astronômes de Rigel, avec leurs téléscopes si perfectionnés vont bientôt connaître l'issue de cette triste histoire des Cathares en Languedoc.

Les tribulations de l'humanité sur la planète TERRE leurs réserve bien des soirées de réflexion...

Excusez cette nouvelle digression !!!

Myrcan de Jokrind
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"Ceci n'est pas pour la foule, mais pour toi, car nous sommes l'un à l'autre un théâtre bien assez grand"
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